Pb : un symbole de l'escalade ?
Pb.
Que signifie ce symbole pour vous ? Quel rapport avec l'escalade ?
"Probleme" ? Oui. Mais non. C'est vrai que pour ecrire vite, on abrege souvent "probleme" en "pb". C'est vrai, pour moi en tout cas, qu'un des principaux interets de l'escalade sportive est de resoudre le(s) probleme(s) de la realisation de la longueur ou de la voie. De la mon adoration pour le "a vue" qui procure une joie et une satisfaction intense meme si realise dans la douleur et a l'arrache.
Mais non donc.
Et puis "il n'y a pas de problemes mais que des solutions". En escalade, pour trouver la solution d'un pas, il est parfois necessaire de passer par le... plomb.
Le plomb. Symbole chimique : Pb. Voila tout est dit. Je vais vous parler un peu (beaucoup) de l'alchimie que j'ai pratique ce dimanche. Car le plomb, dimanche, je l'ai teste en long, en large et en travers...
La journee commencait bien avec la decouverte d'un secteur de couennes du Verdon : le Bauchet. En la bonne compagnie de Bertrand, Fred (dans le role du guide) et Stephane. Fred nous montre et commente les voies du secteur de gauche. Ouaw ! C'est beau. Mais c'est dur : voies d'echauffement en 6b pour Bertrand et 6b+ pour moi... Fred est fatigue, il ne fera que de la moulinette. Comme Stephane, qui reprend et qui ne veut pas se blesser. J'enchaine "La bonne etoile" a vue, sans pb (lire sans probleme ni plomb). Dans "Danae", Bertrand bute. Un pas en traversee le rebute. Il redescend. Je finis la voie. Enfin... J'enchaine jusqu'apres la traversee en notant que c'est du bon gros 6b des familles. Tellement sur de moi, je monte droit vers le point suivant. Mais c'est raide et les prises ne sont pas specialement franches. Alors ? Cela me pose un probleme. Je... plombe. Je prends un plomb. Le premier. Pas de solution ? Si, il fallait reflechir un peu et regarder plus a droite. (En ces temps de propagande Sarkozyste, j'ai un peu de mal... Autre sujet.)
Je ne sais pas d'ou vient cette expression du monde de l'escalade : "prendre un plomb" ou "plomber". De "fil a plomb" ? C'est vrai qu'apres le plomb, la corde et le grimpeur attache au bout, dans les voies deversantes, indique de facon tres nette la verticale ! De "plomber une dent" ? Parce que c'est vrai qu'on se casse parfois les dents (au figure en principe, mais au propre des fois aussi...) a essayer de faire un pas. Je ne sais pas. Si vous oui, dites-le.
Suite des evenements. Je pars dans "Madame reve". 6c, 40m, 4 etoiles si on sort a droite par un toit. 30m, 3 etoiles seulement si on sort a gauche. A faire donc. Et par la droite. Depart teigneux mais j'enchaine et deroule sans... probleme jusque sous le toit. Il me faut un peu de temps pour voir le point sous celui-ci. Rassure, j'y vais en feintant par la droite (comme quoi...). Jusque la, avec le pas du depart, ca doit etre 6b+ max alors le pas est forcement maintenant : ca sent le gros retablissement bien athletique pour passer le toit. 6c ? Il y aura des prises. Hop ! 6c a vue au Bauchet ? Respirer un bon coup. C'est parti. Je trouve une methode pour passer a moitie. Oh ! Des trous ! Et hyper crochetants en plus. Cool. Ca va le faire... Quoi ? Encore des trous au-dessus. Euh... Oui. Mais non. Il faut monter le pied tres haut. Tellement haut. Trop haut. Les bras chauffent. Je... plombe. ... Option fil a plomb. Je passe les details (vous en avez assez en fait) mais je finis apres quelques essais a passer le toit et a me retablir. Mais mon equilibre est precaire et la corde frotte sous le toit malgre que j'ai mis deux degaines (merci Bertrand ou Stephane de m'avoir rappele que le topo conseillait de mettre une degaine longue). Alors, peu sur d'etre capable de forcer assez pour tirer la corde et mousquetonner, plutot que de me prendre un des plus gros plombs de ma carriere, je change de matiere et passe de la chimie aux mathematiques. Un rapide calcul mental (dans certaines situations, n'importe quel grimpeur est tres bon et rapide en calcul mental) montrant que si je plombais la, avec le mou et l'elasticite de la corde, je ferais un trou ds l'air de l'ordre de 6 a 8m..., j'ai honteusement tenu la degaine pour y passer la corde. Je tiens a preciser que j'ai quand meme longtemps hesite a le faire (augmentant ainsi le risque de plombage). ... Quand on sait comme je suis a cheval sur l'ethique. Pfff... Les voies du Bauchet sont un peu engagees.
Avez-vous note qu'au fil de ce passionnant et exaltant recit, on sent la diminution de ma sereinite (deja plutot basse en ce moment) et l'augmentation de troubles de memoire ? Un corollaire de l'exposition au plomb est ? Le saturnisme bien sur ! Et les troubles neurologiques et mentaux associes. J'etais donc deja touche ? Fred et Bertrand vont derriere moi plus ou moins haut. Je passe les details de comment les degaines ont ete recuperees (merci les Marseillais !).
Fin des evenements. Courage. J'ai bientot fini. Stephane aussi. Il s'apprete a partir. Il a sa dose et, meme s'il n'a fait que 2 voies, il s'est bien amuse et est content. Bertrand est seche. Il s'est venge du 6b en enchainant en moulinette le 6b+ mais le 6c a eu raison de lui. Fred, comme Steph, se satisfait de 2 voies. Bon. Quelle heure ? Aller. Je vais essayer un 7a. Sur broches. Je rechapperai ainsi facilement. "Tribulacion de gabachos". Hop ! Depart assez teigneux avale. Bien. Repos naturel. Ca devient devers. Premier pas. Ca passe. Les pieds sont bons. Encore un pas pour rejoindre le point. Hop, je monte tout droit ! Oui. Mais non. Je tiens une reglette pourrie main gauche et suis bloque et ne peux partir a droite vers le point. Impasse. La biochimie fait son oeuvre : le bras gauche chauffe. Et ... je plombe. ... Ok. C'est 7a. Au Bauchet. Normal. Pas d'inquietude. ... Non, juste une erreur d'aiguillage : ca passait a droite (decidement) pour prendre de grosses prises sur une colonette. Stephane est toujours la. Ils me motivent. Bon. La, y'a un bon bombe a passer pour aller chercher le point bien haut et a droite. Ptain... C'est loin la. Fred me confirme que ca engage. Ah... "Y'a pas un monodoigt a gauche ?" "Si, si. J'ai prevu de le prendre et d'aller chopper main droite en epaule le bas de la fissure et puis main gauche au-dessus. Y'a l'air d'y avoir des bonnes prises au-dessus." "Oui, voila, c'est ca." Y'a plus qu'a. Hop ! Oui. ... Mais non ! C'est devers, les prises de pied sont soit trop basses soit trop hautes. Je chauffe. Je ? Plombe. Merci, certains suivent, cela fait plaisir. Stephane s'est installe. Bertrand est a l'affut avec son appareil. Le spectacle peut commencer. Je ne detaille plus. Je ressaye. Je replombe. ... Je ressaye. Yes ! J'ai la bonne prise. Oui ? Mais non... Plus de bras. Je plombe... La methode prend forme et donc je monte toujours un peu plus. Mais plombe toujours un peu plus aussi. ... 6eme essai je crois. Prise tenue, pieds montes ! Ca y est. C'est bon, le pas est fait. Oui ! Mais non ? Par securite, je crois que monter mon pied gauche encore plus haut assurera mon equilibre. C'est le contraire. Plomb ! Record battu. Le plomb a eu raison de moi : plus aucune lucidite, je fais n'importe quoi. Les atteintes mentales du saturnisme dont je parlais... Il est temps de laisser tomber. Rechappe. Ciao !
Le Bauchet, c'est beau. Les voies sont continues et belles. Mais il vaut mieux y aller en etant en forme. Reprendre en couennes la n'est pas une tres bonne idee.
Comme rien ne vaut une bonne petite illustration imagee , encore mieux que des photos, voila mon dernier plomb de dimanche. Ou l'on voit :
- qu'il n'y a pas de problemes mais que des solutions : le pas se fait si on se place bien, en particulier les pieds...
- que le saturnisme a des consequences nefastes sur le comportement : un clair manque de lucidite me fait monter bien trop haut ma jambe gauche et reduit ainsi encore plus mon equilibre deja precaire !
- un plomb.
- l'analogie entre le fil a plomb et le grimpeur suspendu a sa corde...
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